par Sébastien GOULARD
Pour sa première visite à l’étranger, Prabowo Subianto, en tant que Président de la république d’Indonésie le 20 octobre 2024, a choisi la Chine, avant de se rendre aux Etats-Unis, au Pérou pour le prochain sommet de l’APEC, au Brésil et au Royaume-Uni. L’Indonésie pourrait jouer un rôle plus important dans les affaires du monde.
A Beijing, le Président Prabowo Subianto a rencontré son homologue chinois Xi Jinping. Celui-ci l’a invité à rejoindre la Chine pour mener le Sud Global vers un développement harmonieux et plus juste.
Le nouveau Président indonésien a rappelé la position traditionnelle de non-alignement de son pays. C’est notamment à Bandung, en Indonésie, qu’a été formalisé le mouvement des pays non-alignés en 1955. Le Président Subianto reste très attaché à ce principe. L’Indonésie, plus grand musulman du monde, géant de l’Asie du Sud-Est a les capacités pour devenir une des puissances majeures de la prochaine décennie.
Quelles relations avec Beijing ?
Ce n’est pas un hasard si Pranbowo Subianto a choisi la Chine, comme première destination en tant que Président. La Chine est aujourd’hui le premier partenaire commercial de l’Indonésie et a construit et financé d’importantes infrastructures dans l’archipel, notamment à travers le cadre de l’initiative « Belt and Road ». Cependant, Djakarta et Beijing ont encore des différends à régler concernant leurs revendications en mer de Chine méridionale. Des accrochages restent possibles entre les deux marines, notamment dans la zone de Natuna où sont conduites des recherches pour de possibles ressources en hydrocarbures. Subianto a gagné les élections présidentielles en partie dans un contexte de montée du nationalisme indonésien. La population sera donc très attentive à la défense de la souveraineté maritime du pays.
Un rapprochement entre Beijing et Djakarta est toutefois possible sur la question des BRICS. Si son prédécesseur Joko Widodo se montrait réticent à rejoindre les BRICS, Prabowo Subianto est plus enthousiaste et pourrait répondre positivement à l’invitation chinoise.
Une ligne pro-russe ?
C’est dans un esprit de non-alignement que Prabowo Subianto, alors ministre de la défense, avait présenté au forum de dialogue Shangri-La en juin 2023, à Singapour, son plan de paix pour l’Ukraine. Celui-ci avait été immédiatement rejeté par l’Ukraine et ses alliés, puisque de fait il légitimait l’occupation russe de certaines régions d’Ukraine. Cette initiative avait été largement critiquée pour son amateurisme et son caractère pro-russe. Subianto s’est rendu à Moscou en juillet 2024 pour y défendre une politique de bon voisinage avec la Russie, et développer de nouveaux partenariats que ce soir dans l’’éducation ou le nucléaire. Malgré cet échec, on peut s’attendre à ce que le Président Subianto s’empare à nouveaux questions internationales, concernant l’Ukraine, mais aussi le Moyen-Orient.
Des relations à relancer avec l’Union Européenne
On peut regretter que le Président Subianto ne se rende pas dans l’Union Européenne lors de cette première tournée à l’étranger. L’Indonésie et l’Union Européenne connaissent depuis 2017 des relations plus difficiles en raison de de la politique européenne concernant l’huile de palme et la déforestation, ce qui avait poussé Prabowo Subianto a déclaré, durant sa campagne électorale que l’Indonésie n’avait pas besoin de l’Union Européenne. Pourtant Bruxelles peut jouer un rôle dans la politique étrangère d’équilibre (entre la Chine et les Etats-Unis) que veut promouvoir Prabowo Subianto. Le dialogue doit maintenant être restauré entre les deux parties. On ne peut qu’espérer que sur la question de la déforestation comme sur toutes les questions internationales, l’Indonésie et l’Union Européenne puissent travailler de concert.
De nombreux défis pèsent sur l’Indonésie du Président Praboo Subianto ; à l’international le Président devra créer de nouveaux partenariats qui permettront de confirmer la position de grande puissance de l’Indonésie.
Auteur: Sébastien Goulard est le fondateur et rédacteur de Global Connectivities.
