par Sébastien GOULARD
Durant 5 jours, du 9 au 13 juin, les représentants de 175 pays, dont une soixantaine de Chefs d’Etat et de gouvernement ont échangé sur le futur des océans et leur préservation.
Un jalon majeur de cette conférence a été l’adoption des Engagements de Nice pour l’Océan qui constituent une feuille de route globale pour la protection des océans à horizon 2030.
Les océans qui représentent près de 70% de la surface de la terre sont le théâtre de prédation et de menaces dans lesquelles se manifestent les tensions entre les Etats et les acteurs privés au sujet des routes maritimes et des ressources qu’ils offrent.
Afin de réduire ces menaces, la communauté internationale tente de créer de nouveaux outils de coopération. En juin 2017, c’était déroulé à New York, la première édition de l’UNOC qui avait permis une prise de conscience à la fois par les Etats et le secteur privé de l’importance d’une plus grande préservation des océans. Plus de 1300 engagements avaient été consignés dans ce sens, avec notamment la création de nouvelles aires marines protégées ou encore l’annonce de nouvelles politiques concernant la réduction de l’utilisation des sacs plastiques. En 2022, la seconde conférence sur les océans s’était tenue à Lisbonne, avec de nouveaux engagements adoptés et une volonté toujours plus forte de développer la « blue economy » pour mieux associer le secteur privé dans la préservation des ressources océaniques.
Lors de cette troisième conférence des Nations Unions sur l’Océan, les participants sont allés plus loin dans leur coopération et a ainsi été proposé une liste d’engagements : les Engagements de Nice pour les océans. Plusieurs axes de coopération ont ainsi été fixés.
La gouvernance des Océans
L’UNOC 3 a été l’occasion de renforcer la gouvernance des océans, grâce aux annonces faites par plusieurs pays de rejoindre des initiatives existantes. Ainsi, dix-neuf nouveaux Etats ont ratifié le traité sur la Haute Mer (Biodiversity Beyond National Jurisdiction treaty – BBNJ). Cet accord adopté en 2023 a pour objet la protection de la biodiversité dans les eaux internationales. Pour entrer en vigueur, soixante pays doivent l’avoir ratifié pour septembre 2025, il faudra encore la signature de dix Etats pour qu’il puisse être adopté).
La question très controversée de l’exploitation minière des fonds marins a aussi été abordée, et trente-sept pays ont appelé à un moratoire sur l’exploitation minière des grands fonds marins. Mais ce sujet ne fait pas consensus et plusieurs Etats n’ont pas l’intention de renoncer à cette exploitation afin d’assurer un accès plus large aux terres rares.
La lutte contre la pêche illégale se voit renforcée notamment grâce à la ratification par 103 Etats de l’accord de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) « Fish1 » pour mettre fin aux subventions des acteurs de la pêche illégale.
L’UNOC a aussi été l’occasion de la première réunion d’un parlement de la mer rassemblant près de cent représentants issus de tous les continents. Cette initiative devrait permettre une meilleure coopération sur les sujets océaniques au niveau international.
Une meilleure connaissance des océans
L’UNOC 3 a aussi été un temps fort pour la communauté scientifique à travers notamment le « One Ocean Science Congress ». Territoires encore inexplorés, les grands fonds marins font l’objet de nouvelles coopérations avec par exemple la Mission Neptune, un nouveau programme d’exploration scientifique. On peut aussi citer le projet d’un jumeau numérique de l’Océan à travers un nouvel outil : Mercator International Center for the Ocean, développé par douze états européens.
L’essor de la « blue economy »
Un autre axe de travail de cette conférence de Nice a eu pour objet une plus grande participation des investisseurs privés et banques dans l’économie bleue pour assurer une exploitation plus durable des océans. Vingt banques de développement ont par exemple annoncé la création de la coalition « Finance in Common » pour développer la finance bleue.
Des entreprises se sont aussi engagées à mieux prendre en compte l’impact de leurs activités sur le monde marin et à investir dans des solutions plus respectueuses des océans.
La préservation des océans
Enfin, les parties présentes à la conférence de Nice ont réfléchi sur une meilleure protection des espaces marins, avec par exemple la création de nouvelles aires marines protégées. 95 états ont aussi signé une déclaration pour un traité sur les plastiques plus ambitieux en vue de la prochaine session du Comité de négociation intergouvernemental (INC-5.2) sur l’élaboration d’un traité mondial contre la pollution plastique qui se tiendra à Genève en août 2025. D’autres initiatives ont été annoncées pour la protection des requins et la lutte contre les sargasses dans les Caraïbes.
La Conférence des Nations Unies sur les Océans a montré l’intérêt et les préoccupations de l’ensemble de la communauté internationale pour une meilleure protection des océans. Les décisions prises lors de cette rencontre sont ambitieuses et illustrent la prise en compte d’un besoin de coordination au niveau international avec de nouvelles coopérations qui se dessinent. Les menaces qui pèsent sur les océans peuvent bouleverser l’ensemble de l’économie mondiale mais aussi être facteurs d’instabilité politique. Si des Etats peuvent être tentés par une exploitation massive des ressources de l’océan à des fins économiques court-termistes, on assiste néanmoins à une prise de conscience mondiale.
Auteur: Sébastien Goulard est le fondateur et rédacteur de Global Connectivities.