L’accord américano-ukrainien, une condition pour la victoire de l’Ukraine

Les États-Unis et l’Ukraine ont signé un accord stratégique sur l’exploitation des ressources minérales et la reconstruction du pays.

par Sébastien GOULARD

Le 30 avril 2025, les Etats-Unis et l’Ukraine signaient un accord concernant l’exploitation des ressources minérales du pays européen et le soutien américain à sa reconstruction. Cet accord a été longuement négocié  entre les deux parties, mais aujourd’hui, il devrait permettre à l’Ukraine de jouir d’un soutien continu de la part des Etats-Unis, et pour Washington, il permettra de ne pas se faire distancer par d’autres puissances dans la course aux matières premières.

Les relations Etats-Unis Ukraine

Depuis l’élection de Donald Trump, les relations entre Washington et Kyiv se sont refroidies. Faute de n’avoir pu régler le conflit en Ukraine en 24 heures comme il l’avait annoncé durant sa campagne, et de n’avoir convaincu le Président russe, le Président Trump semble frustré. La confrontation très médiatique entre Donald Trump, JD Vance  et Volodymyr Zelensky au bureau Ovale le 1er mars 2025 témoigne de cette agitation.

Pour Trump, il est nécessaire que l’Amérique ne puisse pas « perdre » de l’argent dans le soutien à l’Ukraine suivant le concept d’ « America First »

Depuis le début de la guerre, les Etats-Unis ont versé 114 milliards de dollars d’aide à l’Ukraine, mais Donald Trump veut conditionner la poursuite de l’aide américaine à l’exploitation des ressources naturelles ukrainiennes, afin de se faire « rembourser l’aide apportée ».

Cependant malgré  les discours et la possible réticence de l’administration Trump à soutenir l’Ukraine, l’aide américaine, notamment en termes de renseignement, est essentielle sur le terrain et a permis jusqu’à maintenant à l’Ukraine de résister tant que faire se peut. C’est pourquoi Kyiv a toujours cherché à négocier avec les Etats-Unis. Même s’il n’est pas en position de force, le Président Zelensky a toujours conservé la même approche alliant réalisme et souveraineté nationale.

L’accord Etats-Unis Ukraine sur les ressources minérales

L’accord signé en avril dernier a été long à négocier, il est né de l’initiative du Président Zelensky en septembre 2024. Afin d’assurer la poursuite de l’engagement occidental et notamment américain dans l’effort de guerre mené par l’Ukraine, il était nécessaire d’associer Washington à l’exploitation des ressources minérales présentes dans le sol ukrainien. La stratégie de Zelensky était la suivante : favoriser l’arrivée d’entreprises américaines dans l’Est du pays, afin d’empêcher la progression des troupes russes : selon l’Ukraine, Moscou se montrerait réticent à s’en prendre directement aux intérêts américains sur le sol ukrainien.  

En effet, l’Ukraine est riche en matières premières et notamment en minerais stratégique tels que le graphite, le titane, le lithium ou certaines terres rares. Ces ressources sont nécessaires pour les industries de hautes technologies ainsi qu’à la transition énergétique. L’Ukraine dispose aussi des plus grandes réserves d’uranium d’Europe (environ 2% des réserves mondiales). Cet accord devrait donc permettre aux  Etats-Unis d’être, -relativement-, moins dépendants  de la Chine pour l’accès à certaines ressources stratégiques, ce qui reste l’un des objectifs majeurs de la politique étrangère de l’administration Trump. Pour maintenir l’engagement américain, l’Ukraine doit prouver qu’elle est un élément indispensable à l’autonomie stratégique des pays occidentaux.   

Cet accord, ratifié unanimement par les députés ukrainiens début mai, acte d’un nouveau partenariat économique entre les deux pays. Il permet la création d’un fonds d’investissement pour la reconstruction de l’Ukraine. Au début des négociations, les Américains désiraient qu’à travers cet accord, l’Ukraine puisse rembourser l’aide reçu de Washington, mais la version finale de l’accord ne fait pas état de cette condition. Il s’agit d’un accord juste et équilibré. Les ressources précisées par cette accord (y compris les hydrocarbures) restent la propriété de l’Ukraine) mais les Etats-Unis y ont un accès prioritaire (l’accord précise que cette condition ne va pas à l’encontre de la volonté de l’Ukraine à se conformer à la réglementation de l’Union Européenne) pour leur exploitation.  

D’un point de vue symbolique, ce traité  fait état d’une Ukraine, « libre, souveraine et sûre » et renforce l’engagement des Etats-Unis auprès de Kyiv.

Les objectifs de l’accord

Comme la déclaré le Président américain, grâce à cet accord, les Etats-Unis pourraient obtenir beaucoup plus que ce qu’ils ont versé à l’Ukraine, et c’est exactement l’approche poussée par les Ukrainiens, il s’agit de convaincre les Américains que la victoire de Kyiv aura beaucoup à apporter à leur pays. Cet accord complète un autre accord similaire conclu entre l’’Ukraine et l’Union Européenne en 2021sur les ressources naturelles du pays. Avec ce type de partenariat, l’’Ukraine espère renforcer ses liens avec les puissances occidentales, dans le but notamment de recevoir de nouveaux soutiens militaires, notamment des défenses anti-aériennes. Ces partenariats s’ils sont complétés par des garanties de sécurité (un point que Kyiv espère avancer) devraient rassurer de potentiels investisseurs. L’Ukraine est engagée dans une guerre longue avec la Russie, en plus de remporter victoires contre l’envahisseur russe, le pays doit poursuivre ses activités économiques. La résistance coûte cher et donc il y a un besoin important à soutenir l’économie. En 2024, le montant des investissements étrangers en Ukraine, se sont élevés à 3,3 milliards de dollars soit une baisse de plus de 25% par rapport à 2023. L’accord conclu avec les Etats-Unis doit impulser une nouvelle dynamique et permettre au pays de moderniser ses infrastructures économiques dans un contexte de guerre.

La reconstruction de l’Ukraine ne sera pas tâche aisée, mais avec cet accord, le Président Zelensky a réussi à avoir les Etats-Unis à ses côtés.

Slava Ukraini !  Слава Україні !

Auteur: Sébastien Goulard est le fondateur et rédacteur de Global Connectivities.

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